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Les lectures de Naolou
19 juin 2010

Fred et Edie

FredetEdieFred et Edie - Jill Dawson
Éditions Joëlle Losfeld
2001, 262 pages
20,50 €

Extrait (Edie à Fred) : "Ton amour pour moi est neuf, différent, c'est ma vie, et si les choses devaient mal tourner pour nous, j'aurais toujours cette dernière année à me remémorer, en me disant "j'ai vécu". Je n'avais jamais vraiment vécu jusque-là, et je ne vivrai plus jamais après." Edith Thompson, 1922.

 

Présentation éditeur

 

En 1922, à Londres, éclate une affaire qui bouleverse l'Angleterre. Edith Thompson et son amant, Frederick Bywaters, sont convaincus de meurtre sur la personne du mari d'Edith et condamnés à la peine capitale.
Durant le procès, Fred clame l'innocence d'Edie. Elle n'a jamais comploté contre son mari, ni tenté de l'empoisonner, ni incité son amant à le tuer. Pourtant les jurés - neuf hommes et une femme - ne l'entendront pas de cette manière. C'est la femme qu'ils vont juger à travers les lettres d'Edie à Fred. Une femme dynamique qui se moque des conventions. Une femme qui travaille et gagne plus d'argent que son mari. Une femme qui, à vingt-huit ans, n'a toujours pas d'enfants et qui considère que la vie maritale, lorsqu'elle est monotone, ne vaut pas la peine d'être vécue. Une femme qui vit une extraordinaire histoire d'amour avec un homme de sept ans son cadet.
A l'annonce de sa condamnation, une multitude de voix, dont celle de Virginia Woolf, s'éleva pour réclamer la révision du procès et l'abolition de la peine de mort. Malgré une pétition signée par plusieurs centaines de milliers de Britanniques, Fred et Edie seront pendus le 9 janvier 1923. Le bourreau d'Edie se suicidera par la suite. Le directeur et l'aumônier de la prison démissionneront et passeront leur vie à militer contre la peine de mort.

Mon avis

Jill Dawson, poétesse et éditeur anglaise, a fait de ce fait divers tragique un grand et beau roman sur la femme, sa place dans la société et ce à quoi elle aspire.

Edie a donc la parole, tout au long du livre - à peine est-elle interrompue par quelques articles de presse relatant de l'extérieur l'avancée de son procès et par deux lettres seulement de Fred. De sa cellule, elle écrit à Fred (certains morceaux de ses lettres, notamment ceux cités lors du procès, sont véridiques) mais écrit aussi pour elle-même. De souvenirs en digressions, Edie remonte lentement le fil de sa vie, cherche en son passé et en elle-même ce qui a pu l'amener à cette situation désespérée. Son enfance, ses relations avec sa sœur, son mariage malheureux avec Percy, ses avortements, puis sa rencontre avec Fred, et enfin, ce soir dramatique où son amant prend la décision de mettre fin à la vie de celui qui les sépare... le parcours d'Edie est poignant, terrible, mais ordinaire finalement. Car Edie fume, Edie boit, elle veut décider du bon moment pour enfanter, elle veut connaître le plaisir charnel et le bonheur d'être en vie, de se savoir aimée et comprise, et d'aimer en retour - voilà son seul crime. Quelle femme ne se reconnaîtrait pas dans ce portrait-là ?

Comme souvent, voilà que je peine à mettre des mots sur les émotions que j'ai ressenties au cours de ma lecture... :l J'ai toujours été fascinée par les histoires de condamnés à mort : quels que soient les crimes dont ces personnes se sont rendues coupables, comment peut-on infliger à un être humain une telle souffrance ? Comment peut-on lui dire : on va te tuer dans quelques années, quelques mois, quelques jours, tu vas mourir de cette façon, ça se passeraà cet endroit ? Comment peut-on lui dire ça et le laisser enfermer dans une pièce dans laquelle, en pleine santé, il a tout le temps de réfléchir sur le fait que dans quelques années, quelques mois, quelques jours, quelques heures, il ne sera plus... Brr. J'en ai froid dans le dos. Ce genre de livres me fascine donc, mais Fred et Edie est le seul à m'avoir touchée de cette façon. Peut-être parce que  dans cette histoire l'amour vient se mêler à la mort, on peut même dire est à l'origine de la mort.

Fred et Edie est une histoire dure, tragique, terriblement injuste. C'est aussi un livre magnifique, l'histoire d'une femme moderne, intelligente, et d'un amour inconditionnel. Je ne sais pas quoi ajouter ; j'espère seulement que mon billet mal écrit vous donnera quand même envie de découvrir ce livre inoubliable.

Extrait (lettre d'Edie à sa sœur Avis : elle lui parle d'une photo d'elle deux prises avec Fred, son amant et Percy, son mari) : "Quand je me rappelle l'été que nous avons passé à Shanklin, je revois cette photographie prise sur la plage et où nous sommes tous les quatre. (...) J'essaie de ne pas trop y penser, mais cette idée ne me quitte pas : que d'ici une année, sur nous quatre, toi seule seras en mesure de regarder à nouveau cette photographie. Tu sais ce que je veux dire, Avis. C'est un peu comme ces tubes de verre remplis de sable coloré. Sauf qu'il ne resterait plus qu'une couche et que toutes les autres auraient disparu sans laisser de trace. Et cette unique couche serait sans intérêt, perdue, cassée... perplexe, à tenter d'exister sans les autres. (...) Je ne te demande qu'une chose. Je ne la demande à personne d'autre d'ailleurs, même pas à Dieu, parce que c'est inutile, mais je te la demande à toi, Avis. S'il te plaît pardonne-moi pour tout, si tu peux trouver en ton cœur la force pour le faire."

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