Enervements
Corps à corps... Nos désirs brûlent, nos bouches s'offrent,
Mais nous ne voulons pas sentir toute la joie.
Seins contre seins à travers les étoffes,
Viens ! Gardons entre nous ces laines de soies.
Tes yeux fuient mon regard ; ta tête se dérobe ;
Nos mains rôdent le long des robes.
Respirons de tout près l'âme de ce baiser
Que nous ne voulons pas, ce soir, réaliser.
Sens-tu comme nos genoux tremblent
Ah ! ce désir des hanches amoureuses !
Ah ! Céder !... Défaillir ensemble !... Mourir !... Prendre !...
Cherchons nos doigts ; tâchons d'unir nos paumes creuses.
Des profondeurs en nous grandissent, inconnues :
Etreignons-nous au moins de toutes nos mains nues.
Ma bouche sent déjà la forme de ta bouche :
Mais nous reculerons avant qu'elles se touchent,
Pour que nos sens cabrés souffrent l'ardente joie
De s'être, en sanglotant, arrachés de leur proie.
Enervements - Lucie Delarue Mardrus